L’arrivée de l’application LearnSpirit sur le web a, semble-t-il, été bien accueillie. Il semble que l’application puisse servir bon nombre de formateurs, concepteurs et autres ingénieurs pédagogiques. Pour rappel, celle-ci favorise la structuration de l’écriture des formations avec l’utilisation de la pédagogie par objectifs.
Pourtant, je suis parfois surpris d’entendre dire que « l’application ne se prête pas à la pédagogie par projet ou par problèmes ».
L’application en elle-même n’est bien entendu pas visée, mais c’est bien la mise en œuvre de la pédagogie par objectifs qui l’est. Mais, comment l’utilisation de la pédagogie par objectifs peut être un frein à l’application de méthodes de pédagogie active ?
Une mise au point me semble intéressante. Qu’entend-on par pédagogie active ? Pédagogie par projet et par problème ?
La pédagogie par projet
Active par définition, la pédagogie par projet a été mise en avant par Dewey qui propose des travaux collaboratifs à ses élèves. L’objectif est de développer leur autonomie. Ce qui est remis au goût du jour par Freinet entre autres, après la Seconde Guerre mondiale.
Il s’agit de donner du sens aux apprentissages, en proposant une production concrète qui peut être réalisée en groupe. Tout cela implique une gestion du temps pour les apprenants, une coordination des travaux, etc. Nous obtenons alors un développement de compétences, et non pas uniquement de connaissances. Il s’agit d’aller au-delà du simple savoir-faire [- au sens de reproduire], en favorisant la créativité, l’imagination. Et, pour cela, il est laissé une grande place à l’essai/erreur favorable à la construction des compétences.
En résumé, on propose aux apprenants de construire de toute pièce un projet, commun si possible. Ce qui se traduit en formation par la production de livrables qui doivent répondre à des critères définis à l’avance, qui permettent d’évaluer le niveau de compétences atteint.
La pédagogie par problème
Elle pourrait être identifiée pour son efficacité et similitudes en matière de résultats avec la pédagogie par projet. Nous retrouvons dans la pédagogie par problème le même intérêt pour la mise en activité des apprenants. Et, la collaboration ou encore la coopération. De la même manière sont alors développées des compétences, y compris des compétences transverses, que l’on retrouve comme dans la pédagogie par projet.
La différence majeure avec la pédagogie par projet est qu’il s’agit ici de comprendre comment une chose est produite, construite, réalisée. Le projet est existant et l’on demande aux apprenants d’en comprendre le cheminement qui a mené au résultat proposé. On part de l’analyse d’un cas existant. On va du concret vers l’abstrait.
L’avantage est qu’il est alors possible de trouver de multiples solutions. Ce qui laisse une grande place à l’autonomie, la recherche, la créativité…
C’est alors au groupe de comprendre les objectifs de leurs recherches, d’émettre des hypothèses, de rechercher des réponses à toutes leurs questions.
Pourquoi donc la pédagogie par objectifs serait incompatible avec cela ?
La pédagogie par objectifs ne garantit pas qu’une méthode active sera mise en place, pas plus qu’elle ne garantit le contraire.
Parlant de pédagogie par objectifs, on pense à structurer, ordonner, organiser sa formation. Et de rien d’autre. Alors pourquoi elle s’opposerait aux méthodes actives ?
Prenons un exemple d’écriture de formation avec la pédagogie par objectifs pour une formation qui vise à développer les compétences en conception et animation de classes virtuelles. Nous avons besoin de développer quatre grandes compétences qui se définissent comme ceci, et qui représentent les objectifs généraux de la formation :
1) Décrire une progression pédagogique en classe virtuelle
2) Décrire les spécificités de la formation en classe virtuelle
3) Réaliser des supports adaptés la formation digitale
4) Animer une classe virtuelle
Il y a ici une « progression », car on va générer de nouvelles connaissances liées au sujet. Puis, nous demanderons aux apprenants d’étudier les spécificités du cas pour ensuite être en capacité de proposer des supports qui s’adaptent à cette modalité. Il vont donc pouvoir construire leurs connaissances et développer des compétences selon les activités qui seront ensuite proposées à chaque étape. Et pour terminer, et valider que toutes les compétences sont acquises, chaque apprenant animera sa classe virtuelle, et chaque pair évaluera sa prestation. Il doit toujours y avoir alignement pédagogique.
Alors, comment proposer des activités liées à une pédagogie par projet ?
En déclinant à nouveau chaque étape avec des objectifs précis. Prenons dans cet exemple notre objectif numéro quatre « animer une classe virtuelle ». L’apprenant doit animer une classe virtuelle, mais il doit pour cela avoir :
1) réalisé un guide d’animation décrivant, minute par minute, chaque objectif proposé dans sa classe virtuelle, ce que doit faire le formateur, et ce que fait l’apprenant à chaque étape ;
2) réalisé un didacticiel permettant à chacun de ses apprenants de s’orienter vers sa séance en classe virtuelle sans aucune contrainte, et en ayant proposé un plan B en cas de problèmes ;
3) construit un support qui respecte les règles d’ergonomie indispensables pour une bonne interprétation de la part des apprenants.
Tous ces points répondent à des objectifs opérationnels qui sont :
1) Être capable d’expliquer le rôle de la psychologie cognitive en formation pour adultes
2) Être capable d’exploiter les avantages et les inconvénients de la formation digitale
3) Être capable de structurer ses supports et son animation en classe virtuelle
4) Être capable de critiquer son animation en classe virtuelle
Nous avons donc ici à la fois une utilisation adaptée de la pédagogie par objectifs qui suppose des méthodes pédagogiques actives, comme la pédagogie par projet dans ce cas. Chaque objectif ne peut être atteint que grâce au travail de l’apprenant. Il n’y a donc aucune contradiction entre la pédagogie par objectifs et les diverses méthodes pédagogiques.
Attention, ce type de formation demande un accompagnement de qualité. Ce qui suppose une ingénierie tutorale en parallèle de l’ingénierie pédagogique.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
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